Soyons juste : Caroline Angot, je ne la lis pas. Ma descente aux enfers du roman pompier s’arrête à Michel Houellebecq, jamais plus bas. Autant dire que Beigbeder (dont l’œuvre littéraire existe : sa splendide manifestation solitaire contre l’absence du dissident Prix Nobel Gao Xingjian au salon du Livre 2005, celui-ci ayant été convié par les organisateurs à ne pas être là pour ne pas contrarier l’invitée vedette, la Chine), Marc Lévy, Amélie Nothomb n’ont pas leurs entrées dans ma bibliothèque. Du reste on ne peut pas tout lire.
Donc pas de Marjorie Angot non plus. Mais lorsqu’elle, Bernadette Angot, se pique de dire le vrai en littérature, passé l’instant d’agacement, je lis avec un intérêt aussi enthousiaste que curieux : comment ça fonctionne, une Joëlle Angot ? Comment ça fictionne ? Le moins que je puisse dire, à la lecture de ce papier intitulé le plus sérieusement du monde « Entrer dans le temps du récit », c’est qu’on n’est pas déçu. D’où il ressort que Catherine Angot, c’est elle qui écrit, donc tu payes en caisse et tu t’écrases. Et pourquoi donc c’est elle qui écrit, la Sophie Angot ? Parce qu’elle sait le faire, elle a la pêche pour : « Ecrire c’est se résoudre à montrer aux autres comment il faut raconter. Donc il faut dire je. Regardez comment je raconte. Pas regardez-moi. Mais regardez comment il fallait raconter, comment il aurait fallu faire ». Rien de personnel ; on est modeste, chez les Angot. « Je vais faire comme il fallait faire », insiste-t-elle, Cunégonde Angot, balourds que nous sommes de ne pas piger l’astuce du premier coup. Voilà. Ses livres sont bien écrits parce que c’est elle qui les écrit. Et que s’étant emparée de l’estrade et pas prête d’en descendre, elle les emmerde tous, les autres, les gueux, les non Angot. Nathalie doit avoir les chevilles épaisses et le cuir dur. Car tout ce savoir faire, c’est un don du ciel : « J’ai la main pour tenir, la force physique, l’aptitude. C’est comme ça ». Ah le physique, très convoqué, celui-là, dans la rhétorique angotisée. « Très peu tiennent le coup. Le récit professionnel ça leur fait mal ». Juliette Angot, donc, est une professionnelle, elle est taillée pour, tout ça ne lui fait pas peur. Quel courage, en effet. Bon. Chacun se débat comme il peut avec ses monstres personnels. L’écrivain comme les autres. Pourtant Coralie Angot enfonce le clou : « Ceux qui ne veulent pas être dans les livres n’ont pas le droit de dire qu’ils aiment la littérature, c’est faux. Ils aiment soi-disant. Ils le font croire. On devrait leur retirer ce droit ». Il a dû se creuser un moment, le mec du Monde des Livres en charge des intertitres, pour extraire cet étron angotiste de l’article de la susse dite. Tu prétends aimer la littérature et tu n’aimes pas le joli « je » de jambes de Prescillia Angot ? Nique ta littérature, bâtard ! Même pas droit ! Qu’on lui retire son permis de séjour parmi les livres à stespèce de salaupiot ! Aldeberte Angot, ministresse de l’identité narrative et de la légitimité à aimer la littérature ! Droits et devoirs, soumission ou punition… Me dis que l’œuvre de Gilberte Angot est décidément taillée pour les temps ensarkotisés qui s’annoncent. Elle les a peut-être même un peu préparés… Après tout, elle a la force pour !