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6 juillet 2009 1 06 /07 /juillet /2009 13:52

Il est toujours délicat de se voir confier la relecture du manuscrit d'un proche. A chaque fois la même appréhension. Etre, autant que faire ce peut, juste. Et puis, parfois, ce petit miracle : découvrir sous l'amie d'autrefois l'écrivaine accomplie, la poétesse. Ne pas en revenir. Le talent. Le savoir-faire. Comment elle entre dans l'âme orientale pour mieux s'en défaire, comment elle s'en défait pour mieux la pénétrer. Avec ce qu'il faut de retenue, d'ambiguité, de solaire ironie, de nietzschéène radicalité - celle de ses vingt ans bien sûr, dont j'ai gardé intact le souvenir, mais ici épurée jusqu'à la plus stricte nécessité. J'en ai lu, des manuscrits, du temps où j'étais lecteur pour Viviane Hamy. Aucun n'avait cette fermeté, cette force vibrionnante qui n'appartient qu'aux coeurs qui cognent, vivants, qui poussent éternellement les murs pour vivre plus fort encore ; dans des espaces qu'on ne soupçonnait pas avant que ce soit là, écrit, noir sur blanc. Ne pas dire le nom encore : il s'imposera de lui-même.

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27 juin 2009 6 27 /06 /juin /2009 13:04

Seul ce week-end dans l'atelier Nord pour avancer mon roman amazonien. D'abord libérer la seule âme animale sauvage de la maison, Max, le gros et vieux cochon d'Inde de ma fille. Le laisser venir renifler dans mes pattes de son air circonspect de myope, et trotter où bon lui semble. Ensuite contempler les perruches vertes qui vont en viennent entre les arbres en jetant leurs beaux chants tropicaux sous le soleil. Ne me demandez pas ce que font des perruches en banlieue parisienne ; elles sont ici bien plus célèbres que l'écrivain du coin. Elles ont survécu aux quatre tournées de neige de l'hiver. Elles mettent dans mes oreilles des bruissements de jungle ; ça me va. La pirogue peut ainsi remonter le bon vieux Rio Negro. 

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19 juin 2009 5 19 /06 /juin /2009 09:19
Ne voir en l'autre que l'intention qu'on lui prête, c'est le début du racisme.
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19 mai 2009 2 19 /05 /mai /2009 11:29

ENTRER DANS LA DANSE                     

par Fred  Vargas

 


Nous y voilà, nous  y sommes. Depuis cinquante ans que cette tourmente menace dans les  hauts-fourneaux de l'incurie de l'humanité, nous y sommes.

Dans le mur,  au bord du gouffre, comme seul l'homme sait le faire avec brio, qui ne  perçoit la réalité que lorsqu'elle lui fait mal. Telle notre bonne vieille  cigale à qui nous prêtons nos qualités d'insouciance.

Nous avons chanté,  dansé.

Quand je dis « nous », entendons un quart de l'humanité tandis que  le reste était à la peine.

Nous avons construit la vie meilleure, nous  avons jeté nos pesticides à l'eau, nos fumées dans l'air, nous avons  conduit trois voitures, nous avons vidé les mines, nous avons mangé des  fraises du bout monde, nous avons voyagé en tous sens, nous avons éclairé  les nuits, nous avons chaussé des tennis qui clignotent quand on marche,  nous avons grossi, nous avons mouillé le désert, acidifié la pluie, créé  des clones, franchement on peut dire qu'on s'est bien amusés.

On a  réussi des trucs carrément épatants, très difficiles, comme faire fondre la  banquise, glisser des bestioles génétiquement modifiées sous la  terre, déplacer le Gulf Stream, détruire un tiers des espèces vivantes,  faire péter l'atome, enfoncer des déchets radioactifs dans le sol, ni vu ni  connu.

Franchement on s'est marrés.

Franchement on a bien profité.

Et  on aimerait bien continuer, tant il va de soi qu'il est plus rigolo  de sauter dans un avion avec des tennis lumineuses que de biner des pommes de terre.

Certes.

Mais nous y sommes.

A la Troisième  Révolution.

Qui a ceci de très différent des deux  premières (la  Révolution néolithique et la Révolution  industrielle, pour mémoire) qu'on ne l'a pas choisie.

« On est obligés de la faire, la Troisième  Révolution ? »  demanderont quelques esprits réticents et chagrins.

Oui.

On n'a pas  le choix, elle a déjà commencé, elle ne nous a pas demandé  notre avis.

C'est la mère Nature qui l'a décidé, après nous avoir  aimablement laissés jouer avec elle depuis des décennies.

La mère  Nature, épuisée, souillée, exsangue, nous ferme les robinets.

De pétrole,  de gaz, d'uranium, d'air, d'eau.

Son ultimatum est clair et sans pitié  :

Sauvez-moi, ou crevez avec moi (à l'exception des fourmis et des  araignées qui nous survivront, car très résistantes, et d'ailleurs peu  portées sur la danse).

Sauvez-moi, ou crevez avec moi.

Évidemment, dit  comme ça, on comprend qu'on n'a pas le choix, on s'exécute illico et, même,  si on a le temps, on s'excuse, affolés et honteux.

D'aucuns, un brin  rêveurs, tentent d'obtenir un délai, de s'amuser encore avec la  croissance.

Peine perdue.

Il y a du boulot, plus que l'humanité n'en eut  jamais.

Nettoyer le ciel, laver l'eau, décrasser la terre, abandonner sa  voiture, figer le nucléaire, ramasser les ours blancs, éteindre en partant,  veiller à la paix, contenir l'avidité, trouver des fraises à côté de chez  soi, ne pas sortir la nuit pour les cueillir toutes, en laisser au voisin,  relancer la marine à voile, laisser le charbon là où il est, – attention,  ne nous laissons pas tenter, laissons ce charbon tranquille – récupérer le  crottin, pisser dans les champs (pour le phosphore, on n'en a plus, on a  tout pris dans les mines, on s'est quand même bien marrés).

S'efforcer.  Réfléchir, même.

Et, sans vouloir offenser avec un terme tombé en désuétude, être solidaire.

Avec le voisin, avec l'Europe, avec le  monde.

Colossal programme que celui de la Troisième  Révolution.

Pas d'échappatoire, allons-y.

Encore qu'il  faut noter que récupérer du crottin, et tous ceux qui l'ont fait le savent,  est une activité foncièrement satisfaisante.

Qui n'empêche en rien de  danser le soir venu, ce n'est pas incompatible.

A condition que la paix  soit là, à condition que nous contenions le retour de la barbarie –une  autre des grandes spécialités de l'homme, sa plus aboutie peut-être.

A ce  prix, nous réussirons la Troisième révolution.

A ce prix nous  danserons, autrement sans doute, mais nous danserons encore.

 

Fred  Vargas

Archéologue et écrivain

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6 avril 2009 1 06 /04 /avril /2009 14:57

Dans le climat incertain que nous traversons actuellement, une seule chose est sûre. On ne dira plus : « Un autre monde est possible ». Désormais, un autre monde est en train d'arriver. Sous nos yeux. Qui se précise de jour en jour. Et c’est à nous d’en écrire les lignes de force. Pas demain. Pas après-demain : aujourd’hui. De ce que, ici et maintenant, nous saurons redéfinir nos pensées, nos usages, nos ambitions, naîtra le monde que nous léguerons à nos enfants. Ses vertus auront nos vertus, ses faiblesses auront nos faiblesses. Cette fois-ci, nous n’avons plus personne pour porter le chapeau à notre place. Nous n’héritons plus de l’avenir : nous le fabriquons. Collectivement. Individuellement. En ce sens oui, une crise est d’abord une ouverture au possible.

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23 mars 2009 1 23 /03 /mars /2009 14:48

Le Monde des Livres a publié la liste des incontournables de la rentrée littéraire de janvier 2009 :

 

Des vents contraires d’Olivier Adam ; La Trahison de Thomas Spencer de Philippe Besson ; Un Juif pour l’exemple de Jacques Chessex ; Comme le fantôme d’un jazzman dans la station Mir en déroute de Maurice G.Dantec ; Encyclopédie capricieuse du tout et du rien de Charles Dantzig ; Equatoria de Patrick Deville ; Impardonnables de Philippe Djian ; En bas les nuages de Marc Dugain ; Ramon de Dominique Fernandez ; Les Gens de Philippe Labro ; En Enfance de Mathieu Lindon ; Black Bazar d’Alain Mabanckou ; Cheval de Richard Morgièvre ; Les Voyageurs du Temps de Philippe Sollers ; Paris-Brest de Tanguy Viel.

 

Je suis quant à moi résolument contournable. C’est ce qui fait mon charme.

 

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18 mars 2009 3 18 /03 /mars /2009 10:06

Démocratie, maintenant ! La démocratie n'est pas ce jeu de marionnettes proposé au brave peuple par des gens très sérieux qui en plus des ficelles en tirent surtout de forts juteux bénéfices depuis des générations. La démocratie ce n'est pas voter Chirac avec un pistolet sur la tempe avec un Le Pen au second tour. La démocratie ce n'est pas avoir le choix entre les deux faces d'un même vide, comme aux dernières présidentielles. Moins encore accepter l'Etat en supplétif du Marché. Ne confondrait-on pas démocratie et usurpation ? La première ne serait-elle pas devenue la force vitale de la seconde ? Une vision d'avenir ce matin : que pour le bonheur de tous le comte N.Sarkozy de Nagy-Bocsa retombe dans l'oubli.

A ne pas manquer :
http://sarkostique.over-blog.com/


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13 mars 2009 5 13 /03 /mars /2009 15:07

Mais où sont passés les lecteurs ? D'après le récent sondage TNS-Sofres,  ils ne sont plus que 9% à dévorer au moins un livre par mois. Surtout les femmes, les salariés du service public et retraités, et les électeurs... du Modem et de l'UMP ! Au PS et chez les Verts, manifestement, ça lit peu. Alors quoi ? Le bling-bling serait-il finalement passé à gauche ? 30% des Français ne lisent plus aucun livre. 64% en lisent moins de 5 par an. Tout ça ne correspond pas trop avec le boom des bibliothèques, mais bon. Pourquoi lit-on un livre ? A 31% sur les conseils d'un proche ; 6% sur les conseils du libraire ; 1% suite à un Prix littéraire. L'année 2008 le marché a plutôt bien résisté. La littérature progresse d'1%, tiré par des locomotives comme Stieg Larsson, Anna Gavalda, Marc Lévy, Fred Vargas, Muriel Barbery. Quant à la rentrée de janvier-février, les résultats ne seraient pas fameux en l'absence de grands noms. Si la littérature revenait à ses fondamentaux, si les professionnels manifestaient moins de morgue et plus d'ouverture d'esprit, nous n'en serions peut-être pas là. Mes lectures du moment : Peter Matthiessen, Kenneth White, Edouard Glissant, Olivier Rolin.

Mon éditeur au Salon du Livre : Editions de l'Aube, stand T 55. J'y passerai sans doute samedi vers 16H et prendrai plaisir à vous y rencontrer.  



Plus de chiffres sur la lecture :
http://www.centrenationaldulivre.fr/?Chiffres-cles-du-livre

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6 mars 2009 5 06 /03 /mars /2009 14:51

D'année en année le Salon du Livre de Paris (qui débute le 13 mars prochain) s'est réduit à une grande surface à l'usage de petits lecteurs de feuilleton. Je me souviens de ma rencontre avec Jean Edern-Hallier, et tous les gens autours qui murmuraient : "Ouais, chouette, il est comme à la télé". C'est quoi, un écrivain, quand il est "comme à la télé"?

Même les émissions littéraires puent la grande surface : La "Grande" Librairie, ovni anti-artistique du si sympâthique Busnel aux si sympâtiques questions mongoloïdes (comme si écrire n'existait pas) : on y invite les diva "tête de gondole" comme à la pire période Pivot. Mais on ne peut lui en tenir rigueur : il n'est que le pur produit d'un processus à l'oeuvre depuis longtemps.  Le Centre national des Lettres s'appelle désormais Centre national des Livres. Ca fait belle lurette que nous sommes passés de la défense de l'Art à celle de l'industrie.

Le salon du Livre ? Il enrichit d'abord des vendeurs de mètres carrés. Un salon, c'est le bizness. Les auteurs ? Quand il ne s'appelle ni Anna Gavalda, ni Marc Lévy, ni François Bégaudeau... un écrivain n'a pas de fonction sociale, n'enrichit personne, et donc ne sert à rien. 

Ceci dit, pas un drame. C'est lorsque cela ne sert plus à rien d'écrire qu'advient le livre. Le vrai. Ni tête de gondole ni "grande librairie" ni Fnac de la Porte de Versailles. Juste une oeuvre qui vient.  

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2 mars 2009 1 02 /03 /mars /2009 10:27

Hanté par cette photo. Véritable événement de l'année passée, elle a été prise en mai 2008, par un hélico de la Fondation nationale de l'Indien au Brésil, afin de "montrer qu'ils sont là". Ils seraient ainsi 70 groupes non encore "contactés", à l'écart, dont la présence est le plus souvent niée pour permettre l'exploitation forestière illégale. Celle-ci met leur vie en péril ; donc "ils ne sont pas là". 
Lecture associée : "En liberté dans les champs du seigneur", le chef d'oeuvre de Peter Matthiessen qui vient de reparaître chez L'Imaginaire-Gallimard. Savoir respecter cet écart tout en apprenant de lui.

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