Dans le jardin du
temple Jyomyoin aux 84 000 bouddhas j’ai cru un instant percevoir la rumeur vague du fond des choses – mais non, seulement un avion dans le ciel bleu de cette fin de matinée.
*
Ce qui m’intéresse est moins une croyance qu’une expérience. Il n’y a pas chez moi une once de mysticisme. Je pense à Gary qui
fut moine zen ici, dans ces temples. On y sent moins l’éternité que le vol de l’éphémère. Rien de mystique là-dedans. La réalité telle qu’elle : vide. Etrangement signifiante et belle et
vide.
*
Marche des temples du côté de Yanaka : ils ont pour nom Kanchiin, Myonji, Daioji, Daienji, Zuirinji, Tahoin, Kan-noji,
Sorinji, Chokyuin, Jishoin, Tenryuin, Chomeiji, Ryusenji, Honkoji, Myokoji, Sozenji, Rinkoji, Gyokurinji, Ichijogi, Rengeji, Ryogenji, Zuirinji, Fukusoji, Anryuji, Jozaiji, Kudokurinji, Choanji,
Honryuji, Kanouin, Myounji, Kyo-oji, Enmeiin, Nansenji, Tenneji, Hongyoji.
*
Mince filet d’eau qui glisse le long du bambou dans le roc évidé d’où le trop-plein s’échappe en lente mousse verte. Ecuelle
rituelle dos au soleil. A l’ombre du ficus le bouddhas garde les yeux mi-clos sur ses mains jointes. Comme Avalokitesvara, éveille-toi par le son. Le bruit de la petite fontaine, c’est le Bouddha
d’Asakusa qui t’a suivi jusque-là. A cette pensée ma poitrine se gonfle de reconnaissance.
*
Arpentant cette voie je marche sur une route plus ancienne que le temps des hommes, trop nouvelle pour le temps des
hommes.
*
Meiji-Jingu Temple, devant la fontaine : Fais comme eux : rince-toi la bouche avant de prononcer toute parole
importante, rince-toi les mains avant d’écrire toute phrase te tenant vraiment à cœur.
*
Dans l’obscurité du temple à demi fermé je n’ai aperçu rien d’autre que deux chaussettes blanches qui montaient furtivement
vers l’autel avec une souplesse de jeune chat – un prêtre shinto sans doute, à moins que ce ne soit un esprit à chaussettes blanches.
*
Cimetière de Yanaka – rien d’humain ici. L’endroit ne peut convenir qu’aux morts, aux corbeaux et aux
éveillés.