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6 mai 2014 2 06 /05 /mai /2014 15:39

Il faut quelques instants au spectateur accueilli à bras ouverts pour réaliser ce qu’il lui arrive. On se saute dans les bras, on s’embrasse, on fête des retrouvailles… Sauf que personne ne se connaît !

Ça se passe au Théâtre de Verre à Paris, dans le XVIIIe. La troupe le Corps Collectif y présente sa « Partition Ouverte ». On prend place autour de la scène (chaises dépareillées, fauteuils, canapés), l’esprit rendu étonnement disponible par la chaleur de cet accueil qui vibre encore en vous de toute la bienveillance de ce Free Hug inattendu.

Un fond sonore accompagne cette première sensation. Très vite les membres de la troupe virevoltent, souriants ou concentrés, traversent la scène en courant, installent les derniers arrivants, prennent des poses caressantes avec les spectateurs. Vous font dessiner sur leur corps vos propres cicatrices, comme pour porter votre douleur, vous la retirer. La disperser comme cendre à travers la danse qui les emporte.

Quand la troupe du Corps Collectif (Treize membres, presque autant de filles que de garçons, de tous âges, de tous physiques) se réunit pour le premier mouvement, le spectacle ne fait que se poursuivre. En fait il a déjà commencé. Quelque chose vous dit qu’il a commencé le jour de votre naissance, et peut-être même avant.

Sonorité des profondeurs. A la surface cette vague : vague humaine, haute, assemblée, qui va roulant sur elle-même, au ralenti, jusqu’à venir se fracasser contre le mur de la salle. Lente dénudation, aléatoire, sporadique – voilà que les vêtements s’ouvrent, surgissement de formes d’ordinaire invisibles, de formes en désordre ; d’autant plus animales, voyantes, que l’habit n’est pas encore tombé, qu’il s’accroche comme une dernière illusion fabriquée par l’esprit. Rien de violent dans ce chaos, rien de déchirant dans ce lent appareillage en dehors du social. Un naturel, un affectueux détachement, un pas glissé hors de l’illusion pour retrouver la magie du réel.

L’habit vidé, tombé au sol, désinvesti ; le corps ré-habité, réhabilité. Oui dans sa nudité. Bien sûr dans sa nudité. Mais l’œil qui voit n’indique rien. C’est le cœur comme il bat, le rire comme il retentit, la gorge comme elle se serre. On regarde tous ces corps ensemble, assemblés-désassemblés, à la fois singuliers et collectifs, uniques et génériques, dans leur belle harmonie dépareillée. Qui s’emmêlent dans les linges des autres, se travestissent, se dévêtent à nouveau. Il passe dans ces mouvements la transe de la tribu, la sauvagerie de la meute animale, le clin d’œil du burlesque, la gravité de l’apparition, la sensualité de la beauté pure, le rire d’être en vie, le jeu d’enfant, la liberté du happening, le grotesque du mime, la fantaisie du rêve. C’est une farce et c’est une possession.

Bruits des corps nus qui s’effondrent en cadence, chair jetée-plaquée contre le sol, courses poursuites, nouveaux écroulements. Essoufflement. Sueur. Respirations bruyantes des corps allongés dans le silence. Moments de calme entre les danses où les membres du collectif viennent se glisser dans le public, voulant y trouver un refuge plein d’affection – comme bête traquée. Juste avant que le mouvement ne les reprenne.

On pense à ces vers de Gregory Corso : « Nous sommes innocents et libres – nous sommes des mammifères ! »

Cette « Partition Ouverte » possède la folie du rituel, la force de l’œuvre ouverte, la précision de l’irréfutable, la fluidité du vivant, la bienveillance miraculeuse de la tribu. Tout n’est plus qu’énergie, vibration, mouvement, relation. Une expérience totale où l’individu, qu’il soit acteur ou spectateur, s’affranchit des limites ordinaires. L’engramme social, avec ses simagrées et ses « identités », a été retourné comme un gant, déjoué. Dans le pêle-mêle de ces corps exposés à leur propre fragilité (et qui expose du même coup la nôtre), l’intuition de tout ce que nous aurons été ensemble ; vivant là, le temps compté d’une existence, séparés par les conventions arbitraires, les préventions, les précautions ; mais tout de même ensemble, même si peu, même si mal. Tellement proches, tellement proches et aimant et utopiques et mélangés qu’un rien peut enrayer ce programme officiel imposé par la société à seule fin de nous accabler de solitude. La norme est une machine à désespoir. Ici personne ne sera plus jamais seul. Faire lien. Un regard suffit. Une main qui se pose sur un bras, une tête sur une épaule. Etre cette épaule pour l’autre. Fut-il, fut-elle un(e) inconnu(e). Une voix s’élève, les autres lui répondent ; c’est un chant. « Que sera sera»… Qui vivra verra. Atterrissage en douceur, au terme de cette fantasia de chair et d’émotions, de cette traversée des apparences, cette cavalcade dans l’ouvert, cette fracassante balade dans l’apesanteur du corps animal.

Tout ce que nous aurons été ensemble… Cette nostalgie anticipée, mais apaisée, qui étreint à présent le spectateur lorsqu’il hésite à prendre conscience que la séquence est achevée, qu’il est temps pour lui d’applaudir, de quitter la ronde utopique ; de sortir du cercle des sorciers.

Merde, nous sommes vivants !

Site du Corps Collectif

http://www.lecorpscollectif.com

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3 mai 2014 6 03 /05 /mai /2014 09:16

 

Construction de l'image de soi à travers l'autofiction, influence des séries... La transformation de la littérature en pure visualité est l'une des conséquences de notre soumission à l'empire de la technique. La preuve que la logique techniciste a triomphé de la culture. En ce sens il ne peut plus s'agir que d'une littérature de collaboration.

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30 avril 2014 3 30 /04 /avril /2014 07:52

L'universel ne prend tout son sens que dans le singulier.

 

Variante: Ce n'est qu'à travers le singulier que l'universel prend tout son sens.

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27 avril 2014 7 27 /04 /avril /2014 11:02

 

Où est inscrite la loyauté

Comment s'incarne la justice

La recherche de la vérité constitue-t-elle encore un enjeu pour la société

La connaissance a-t-elle encore une valeur performative

 

 

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19 avril 2014 6 19 /04 /avril /2014 10:03

Equateurs équarris

interval

- les poétiques

pour mesurer la vie

à l'échelle

de l'inouï

Celui qui sait

ne va nulle part

immobile

silence

qui ne dit

ni ne tait

au sein du vaste

dans l'inconstance

du pire

et du meilleur

permanence du

changement

du même au même

à travers

le même

Les renonçants sont

des saints

les seuls peut-être

véritables

Rimbaud s'arrête

Melville s'arrête

lignes interrompues

ouvertes

à autre chose

 

en grand et

inexorablement

 

 

 

 

Gérard Larnac - avril 2014.

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18 avril 2014 5 18 /04 /avril /2014 08:00

Avant-garde : un processus de désaffiliation, de déconditionnement qui favorise l’apparition existentielle et artistique d’un écart, vécu comme le nouvel horizon d’attente de la modernité parce qu’il en constitue, à travers sa proposition inattendue, à la fois la somme, la critique et le dépassement.

On dit le processus en panne. Force est de constater que l’avant-garde ne se signale guère à notre attention. Si l’individu contemporain a bien du mal à répondre à l’injonction « Adaptez-vous », c’est faute de savoir « à quoi s’adapter » - et non « comment s’adapter». Une même question se pose à l’avant-garde : de quoi se retirer ? Impossible aujourd’hui de savoir dans quoi s’engager, de quoi se dégager. L’avant-garde est le double inverse de la société intégrative. Or celle-ci disparue, disparaît du même coup la possibilité de l’avant-garde.

En se volatilisant, la société a ôté du même coup à l’individu cette capacité de révolte dont l’avant-garde n’est qu’une des nombreuses manifestations. Pas de contre-culture sans culture préalable. Si la tentation d’avant-garde, le goût de l’avant-garde, demeurent, c’est à la manière de la sensation dans un membre fantôme. Ainsi chacun possède secrètement son moment d’avant-garde, qui l’anarchie, qui Dada, qui Picasso, qui les Surréalistes ou les débuts du rock’n roll… Une approche muséale, mémorielle, commémorative – décorative en somme. La néo-avant-garde est partout, dans la publicité ou dans le papier peint, plus référentielle que vivante ; l’inattendu manque.

Mais de quoi faudrait-il être si fier ? Les avant-gardes ont-elles rendu la société plus juste, plus équilibrée ? Aujourd’hui la haine de la culture et de la connaissance a pris le pas sur la haine de l’injustice et de l’exploitation politico-économique. La culture n’a pas su se rendre assez aimable, ni assez proche, ni assez vivante, ni assez désirable. Le même reproche sera adressé à l’avant-garde, entendue comme pointe avancée de la culture.

L’avant-garde est comme la jeunesse ; on sait seulement que quelque chose s’est passé, que cette chose n’est plus là mais que rien ne peut faire qu’elle n’ait pas été. En cela elle nous constitue, comme un sédiment très profond dont le principe est, qu’on le veuille ou non, encore actif.

La société n’est plus la somme de valeurs dont on pouvait naguère encore contester l’empire ; mais la somme des flux, des courants, des vitesses auxquels nous sommes continument livrés.  On peut toujours fuir : cela ne constituera pas une avant-garde. L’avant-garde fait partie intégrante de la société de son temps. Elle est la conscience des tectoniques sociales. L’avant-garde consiste à faire plier l’ici maintenant au désir irrépressible de l’ailleurs, de l’autrement. L’underground n’est pas un « other ground ». Oser la sortie vers l’otherground représenterait quelque chose d’autre qu’une avant-garde. La société en réseau favorise, par le jeu de ses interactions faibles, la constitution d’un tel otherground ; d’une telle utopie.

C’est peut-être dans ses ratés même qu’il faut concevoir une avant-garde toujours possible ; car l’avant-garde est avant tout désir d’avant-garde. Jusqu’en cette société vaporisée, même au sein de cet individualisme sans sujet qui est notre actuelle condition, il y a place encore pour un geste ayant vocation d’étonner, de dévier, de revitaliser. Cela donnerait enfin de la gueule à la vie. Un geste né derrière le fantôme des avant-gardes, mais conservant comme elles le pouvoir d’ouverture, d’utopie et de métamorphose.

L’urbanisation forcenée crée la modernité comme un lieu arraché au passé, à la mémoire. Son moteur, c’est l’à-venir. Le changement perpétuel. La vitesse. Pareil à la bicyclette qui ne tient droit qu’en mouvement. La ville a autant besoin de mouvement que l’usine. Sa production en série : le sentiment de contemporanéité. Cela suffit à la soumission des masses.

L’utopie est avant tout le chemin qui y conduit, un chemin que l’on n’aurait jamais emprunté sans elle. En cela l’utopie c’est l’autre mot pour « avenir ». C’est cette force d’avenir, cette force d’utopie, qu’il faut réveiller sous les avant-gardes assoupies. Face au non-sens absolu que constitue la société contemporaine le Sujet absent, éparpillé, trouve l’occasion de se ressaisir.

Chacun des moments, chacun des lieux propices à ce ressaisissement est un espace d’avant-garde.

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12 avril 2014 6 12 /04 /avril /2014 13:07

"Le discours décharné et rabou­gri de la gauche, son empressement à se fondre dans l’ordre libéral planétaire (Pascal Lamy), son assimilation du marché à « l’air qu’on respire » (Ségolène Royal), sa proximité avec le monde du spectacle et de la frime (Jack Lang), sa réticence à évoquer la question de classes sous quelque forme que ce soit, sa peur du volontarisme poli­tique, sa haine du conflit, enfin, tout cela n’aurait-il pas préparé le terrain à la victoire de ses adversaires ? Les éter­nels « rénovateurs » de la gauche ne semblent jamais s’ins­pirer de ce genre de questionnement, au contraire. Il n’existe pas de meilleure preuve de son urgence."

 

Serge Halimi

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7 avril 2014 1 07 /04 /avril /2014 09:14

"La presse underground représente la seule opposition sérieuse à une puissance grandissante et aux techniques de plus en plus sophistiquées utilisées par les mass media de l'establishment pour falsifier, dénaturer, citer à faux, écarter comme ridicule a priori, ou simplement ignorer ou effacer pour toujours les données, les livres, les découvertes qu'ils jugent contraires aux intérêts dudit establishment."

William S.Burroughs

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7 avril 2014 1 07 /04 /avril /2014 09:03

Connaissance................. Autonomie

. .

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Liberté ......................... Contestation

La Connaissance est la clef de l'autonomie qui permet l'esprit de contestation qui, seul, donne accès à la liberté. C'est ce que j'appelle la boucle de rétroaction libératoire.

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1 avril 2014 2 01 /04 /avril /2014 13:54

Il est deux mondes que tout oppose: celui qui aspire à développer les droits humains, le respect de l'autre, l'expression des cultures et la maturation des idées ; et celui qui entend entreprendre et conquérir, dans une logique de profit maximum et de globalisation.

Aucun n'est moins légitime que l'autre.

Ce n'est pas par incompétence ou sens moral que l'on refuse de faire fortune, ce n'est pas par bêtise et inculture que l'on consacr sa vie aux affres de l'économie.

La dissymétrie vient de ce que le monde de l'économie tend à désorganiser le monde de la culture en y imposant ses logiques, tandis que le monde de la culture se montre inapte à conduire le monde de l'économie vers ses vues et ses modes de fonctionnement.

Personne n'est fondamentalement dans l'erreur.

Mais ces deux mondes ne sont pas conciliables.

La politique, la vraie, consisterait à organiser simplement, avec lucidité, leur coexistence pacifique.

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